Contexte – problématique initiale

Inégalités sociales : Les Cultural Studies en contexte d’urgence écologique et de changement social.

1.Contexte général :

Il nous parait important de redéfinir l’ensemble des termes utilisés dans notre question de recherche initiale au cours de ces deux premières années de recherche.

2.Contexte initial: Pourquoi l’approche intuitive des cultural studies?

L’objet de cultural studies est de se poser la question suivante : « Qu’est-ce que la culture ? Et quels sont les ressorts culturels du changement social ? Le projet critique des Cultural Studies qui émergent en Grande-Bretagne dans les années 1960 avant de s’internationaliser est sous-tendu par ce questionnement. (…) Le projet réside dans la compréhension des dimensions culturelles du changement social…Une mise en marche de la pensée tournée vers l’action.Une théorie comme une manière d’appareiller conceptuellement les mouvements sociaux et les individus, de dégager les conditions de l’action en identifiant les spécificités du contexte. (…) … un axe historique et un axe philosophique portant sur la relation entre les transformations culturelles et le changement social »ou encore « C’est un projet d’études interdisciplinaire et collectif qui a pour champ les formes, les pratiques et les institutions culturelles et leur rapport avec la société et le changement social ». (Quemener,Cervulle 2018)

3.Problématique: Comment démocratiser la transition écologique, et, ainsi, réduire des inégalités économico-sociales du mouvement ?

Les conclusions de la recherche sur les initiatives de transition (sous appel interne HELMo) mènent au constat d’un manque de représentation des publics précarisés dans le mouvement. Pourtant, si ce mouvement souhaite sortir des inégalités sociales, il est donc bel et bien primordial que ces publics puissent participer pleinement au processus politique.

4.Problématique et cadre théorique: Murray Bookchin comme cadre théorique significativement transversal 

De manière récurrente, nous observons et apprenons qu’une part significative des personnes approchées dans le cadre de cette recherche se reconnaissent, chemin faisant dans les écrits de Murray Bookchin. A ce stade et en lien avec nos investigations, l’approche théorique de l’écologie sociale semble constituer le cadre le plus représentatif. Comme nous avons pu l’observer à l’occasion des RIES 2019 organisées à Liège. Compte-rendu des RIES2019.

5. Sur la nécessité de redéfinition des publics suite au comité d’accompagnement en fin de deuxième année de recherche.

Suite aux remarques formulées par notre comité d’accompagnement nous pensons qu’il est important de préciser la définition des catégories de publics auprès desquels nous avons mené des entretiens. Notre public initial était constitué de migrants, la plupart sans-papiers et de bénéficiaires du CPAS. Ces publics correspondaient à la définition des publics subalternes telle que nous l’avons précisée. Ces publics sont peu sensibles aux questions de transition écologique en raison de leurs situations et des logiques de survie au quotidien dans lesquelles elles et ils se trouvent( Cfr entretiens des étudiants de Bénédicte). Dans le rapport de la Deutsche Bank de septembre 2020, cité par Guillaume Morris dans l’article «  La fin du monde vue par le capital financier » [1] , l’auteur émet l’hypothèse suivante :  » Bref, ce que propose le rapport, c’est une alliance populiste (que l’on a déjà pu observer avec Trump, Bolsonaro mais aussi en Europe) autour de l’idéologie de croissance entre les intérêts du capital et ceux des couches populaires. S’oppose ainsi, en termes presque gramsciens, une stratégie du capital financier à ce qui pourrait être une autre stratégie alliant écologie et conquête de l’égalité. « 

C’est pourquoi la suite de nos entretiens se sont déroulés avec des actrices et des acteurs qui développent des stratégies «  alliant écologie et conquête de l’égalité ». Le point de départ fut un appel du squat Entre-Murs Entre-Mondes situé à Liège dans le quartier St Léonard et qui proposait la création d’un foyer des luttes. Nous nous sommes rendus à cette première réunion en aout 2019. Nous avons pu à partir de cette réunion identifier une série d’actrices et d’acteurs qui nous ont amenés ensuite aux 3ème Rencontres Internationales de l’Écologie Sociale ( Liège, Septembre 2019), à la Commune des Communes ( Sampigny, janvier 2020), à débuter un processus de recherche-action (malheureusement avorté en raison de la crise sanitaire), à rencontrer des activistes de la ZAD d’Arlon ( septembre 2020), à la Ferme du Hayon ( janvier 2021), à une réunion de  préparation de l’accueil de la délégation zapatiste ( Liège, Casa Nicaragua, juin 2021).

Toutes ces catégories d’actrices et d’acteurs articulent effectivement des stratégies « alliant écologie et conquête de l’égalité », d’une part. Et d’autre part correspondent à la définition de subalterne telle que définie dans l’évolution du terme dans le travail d’Antonio Gramsci. « Le nouvel usage du terme subalterne

est dialectiquement lié au terme «dominant» (Liguori, 2016) ». Nous avons formulé aussi l’hypothèse que le mouvement de transition serait une initiative des dominants avec laquelle nos publics sont en rupture. Nos catégories d’actrices et d’acteurs ont donc toutes et tous ces 3 caractéristiques : elles et ils peuvent être défini(e)s comme subalternes (dans un rapport antagonique à la notion de dominant), elles et ils tentent « d’allier écologie et conquête de l’égalité », elles et ils sont dans une forme de rupture hégémonique [2]avec le discours dominant sur les initiatives de transition.


[1] Morris,G.( 21 mai 2021) «  La fin du mode vue par le capital financier ». Terrestres.org

[2] Mileschi, Ch «  Gilets jaunes, ou la révolte des subalternes » in « HISTORIA MAGISTRA » 28/2018, pp. 11-14, DOI:10.3280/HM2018-0280